Histoire à la C.. (vécue)
Lorsque l’on construit un nouveau modèle, on a toujours hâte de le voir en l’air. Alors si vous êtes comme moi, lisez ce qui va suivre et tirez en les conclusions qui s’imposent car un jour cela pourrait bien vous arriver.
Après plusieurs jours de construction (assemblage est plus approprié dans le cas des kits ARTF) l’avion est pratiquement terminé. Le moteur a été soigneusement rodé au banc et tourne comme une horloge. Il a ensuite été monté sur le bâti du modèle, puis démonté et remonté plusieurs fois afin d’ajuster au mieux le capot. Enfin il est installé une dernière fois mais sans sécuriser les fixations car de petits ajustages restaient à faire.
Entre temps, le centrage a été effectué, le débattement des gouvernes dégrossi sans peaufiner les réglages ni inclure d’exponentiel, mais ce n’est qu’une base de départ.
Lors d’un des derniers beaux week end de la saison où le soleil est de la partie, la tentation de faire touner la mécanique est trop forte. Direction le terrain avec la ferme intention de régler le moteur sur la machine et faire quelques essais de roulage au sol (je pense que dans le genre, certains se reconnaitront)
L’herbe est un peu haute, nous sommes début novembre et le terrain n’a pas été tondu récemment. Le moteur tire fort, quelques allers et retours de piste montrent que la puissance est au rendez-vous.
Voulant juger du moment où la portance devient suffisante pour décoller, je pousse un peu plus sur le manche des gaz. L’avion accélère franchement et se retrouve à 1 mètre du sol en bout de piste sans possibilité de se poser ailleur que dans le champ labouré. Stupeur ! que faire ? Si je pose droit devant je risque d’arracher le train d’atterrissage dans les ornières des labours. Alors en une fraction de seconde, je pousse les gaz à fond et l’avion prends de la hauteur. Mais les ennuis ne sont pas terminés, je vous rappelle que les réglages sont basiques et sans expo. Le modèle étant un appareil de voltige 3D, les réactions sont assez hard. Heureusement une bonne fée veillait sur mon étoile, en la personne de Thierry qui se trouvait à proximité et est accouru à mon aide. Je lui ai passé l’émetteur et il a assagi la bête. Après quelques réglages de trims, la machine vole et plutôt bien même. Cependant il ne faut pas trop abuser car je crains un desserrage des vis de fixation du moteur. Quelques figures de voltige sont réalisées, même un torque-roll est essayé. Enfin le pilote se décide à ramener le modèle sur la planète, ce qui sera fait sans souci. La charge alaire étant faible, l’avion se pose comme une fleur. Je pousse un gros soupir de soulagement, tout s’est bien terminé pour une fois !
Alors que je venais de décoller, un pilote de motoplaneur qui était en vol (le motoplaneur, pas le pilote) sans doute distrait par le bruit du moteur a détourné le regard de son appareil pendant un court instant et l’a perdu de vue. Lorsqu’il l’a revu, il ne savait plus dans quelle situation il se trouvait et le motoplaneur a terminé sa course dans les arbres en bout de piste, heureusement sans gros dommages.
Daniel, si tu me lis, reste c. o. n. c. e. n. t. r. é. sur ton pilotage. Enfin, c’est juste mon avis.
Retour au parking sous les quolibets des autres pilotes présents ce jour là qui s’amusaient comme des petits fous, car avant le départ je claironnais à qui voulait l’entendre que ce n’étaient que des essais de roulage sans intention de décoller.
Tout est bien qui finit bien grâce à une bonne décision et à l’intervention rapide de Thierry. Merci à lui.
La morale de cette histoire :
- rester discret sur ses intentions
- ne pas tenter le diable tant que l’avion n’est pas entièrement prêt à voler
L’épilogue de cette aventure a eu lieu au parking
Une dame qui se trouvait derrière le grillage m’a demandé si elle pouvait prendre une photo de son petit garçon auprès de l’avion qui lui plaisait beaucoup, ce que j’ai accepté volontiers. Nous avons installé cet enfant en lui faisant prendre l’appareil dans les mains. Il était rayonnant. La dame a pris quelques clichés et m’a remercié chaleureusement pour une chose pourtant banale.
Avant son départ, elle m’a expliqué que ce n’était pas son fils mais un petit garçon Irakien venu en France grâce à une association caritative. Il est gravement malade et doit être opéré à coeur ouvert, ses jours étant comptés.
Ses parents, pourtant aisés avant la guerre sont restés en Irak, dépouillés de tout et n’ont pû l’accompagner.
Alors si ce petit garçon a été heureux ne serait-ce que quelques instants, j’en suis ravi et je lui souhaite de pouvoir continuer à rêver encore longtemps devant nos machines volantes.
Et peut être qu’un jour…
Michel MALABAT